Huit

Une peinture peut-elle avoir un sens caché ? Certaines œuvres dont l'interprétation semble évidente requièrent parfois une lecture plus attentive. En témoigne ma composition intitulée Huit.

En 2011, j'ai été lauréat, avec une douzaine d'autres peintres, de la fondation Colas. Sélectionné sur dossier artistique constitué d’œuvres inspirées du Japon, je devais réaliser une peinture sur le thème de la route.

Pour répondre à la commande, j'ai décidé de me lancer dans une nouvelle série, 1001 nuits, inspirée d'un récent séjour en Inde. J'avais pris de nombreuses photos en voiture à l'occasion des très longs déplacements. Les visions furtives de créatures fantomatiques souvent tronquées – humains et animaux confondus –, dans une lumière poudreuse et dorée, me hantaient. Il était temps de les faire revivre.

J'ai choisi assez vite la composition destinée à la fondation mais le travail sur commande est toujours un défi. Afin de me familiariser avec l'atmosphère spécifique de l'Inde, j'ai commencé par une autre composition intitulée Porcs et vaches. Sur un fond brossé d'ocre beige, deux vaches et de nombreux cochons se nourrissent d'une décharge sauvage dans la campagne. La scène est presque abstraite, animaux et emballages multicolores sont traités en larges touches, se détachant à peine du paysage.

Cet essai étant concluant, j'ai réalisé ensuite une petite version – 89 x 116 cm - de la toile que je destinais à la fondation Colas – 114 x 146 cm. Pour éviter la répétition, et l'ennui qui en découle, je m'arrange toujours pour introduire des différences entre les travaux que je réalise à partir d'un même motif. Ainsi la lumière de la version définitive est plus rose que celle de la première.

Dans un paysage de campagne, un bouvier, le bâton sur l'épaule, le buste enveloppée dans un tissu bleu prune, mène un troupeau de vaches. La scène pourrait sembler anecdotique si la hauteur imposante des bêtes, leur robe sombre et la longueur des ombres n'apportaient une touche de solennité. En partie cachée par le bouvier, une borne kilométrique, comme celles que l'on trouvait autrefois sur les routes de France, porte le chiffre 8, donnant son titre aux deux versions. Je n'ai pas choisi ce chiffre, il est cependant une coïncidence heureuse, amplifiant l'interprétation spirituelle de l’œuvre.

« De même qu'avec un bâton le bouvier conduit les vaches à la pâture, ainsi font la mort et l'âge qui conduisent à leur fin la vie des existences. » - Dhammapada, 135.

Si vous désirez découvrir les peintures de la série 1001 nuits, cliquez vite sur ce lien.

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